Intervention d'Elsa RICHARD sur la demande de classification en zone tendue d'Angers Loire Métropole, conseil communautaire du 13 mars 2023.
A travers cette délibération, ALM reconnait enfin explicitement la tension qui pèse sur le logement sur notre territoire. C’est en cela une très bonne nouvelle que notre assemblée s’engage, enfin, dans une démarche de régulation du marché. Nous vous en remercions. Sans rancune : les critiques que vous nous adressiez hier deviennent vos justifications pour cette demande de classement en zone tendue aujourd’hui !
Tant mieux pour toutes celles et ceux qui peinent à se loger aujourd’hui.
La délibération que vous nous présentez n’est pas très motivée. Il me semble important de rappeler ici quelques réalités qui fondent la nécessité d’activer cet outil de régulation du marché locatif.
D’abord en raison du poids croissant du logement dans la dépense des ménages. Le prix des logements anciens comme celui des loyers ont augmenté plus vite que les prix à la consommation, comme le rappelle France stratégie. Au cours des trente dernières années, le prix réel des logements anciens a été multiplié par deux, tandis que les loyers réels progressaient de 30%. Sur la même période, la proportion de personnes déclarant que leurs dépenses de logement constituent une “lourde charge”, une “très lourde charge” ou une “charge à laquelle ils ne peuvent faire face” passait de 34% à 49%.
Le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc) affirme par ailleurs que le logement pèse de plus en plus dans les dépenses des ménages. En 50 ans, alors que les prix à la consommation ont été multipliés par 10, les prix des loyers ont été multipliés par 18, ceux des charges ont été multipliés par 26 et les prix de l’immobilier ont été multipliés par 55. Ce contexte touche en particulier les ménages les plus modestes qui accèdent plus difficilement à la propriété et restent locataires.
Ensuite, en raison de l’évolution fulgurante du marché sur Angers Loire métropole, marqué par un déséquilibre majeur entre l'offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d'accès au logement sur l'ensemble du parc résidentiel existant, pour les populations étudiantes, les jeunes actifs, les personnes seules, les ménages modestes, les 18 000 dossiers en attente de logement social…
Le Loyer moyen du parc privé sur ALM est de 13,2€/m². On est au-dessus d’Aix Marseille (12,8€/m²), de l’agglomération de Nantes (11,2€/m²), Lille ou Lyon. Les loyers atteignent sur ALM 17,5€/m² pour les T1. Ils ont progressé de près de 5% (4,8%) entre 2021 et 2022 (d’après la note observatoire de l’habitat, AURA, 2022).
Il s’agit donc évidemment de maintenir accessible notre territoire à tous les portefeuilles, c’est une question éminemment de justice sociale, mais également écologique.
Car plus le coût des logements dans le pôle centre sera élevé, plus les distances domicile-travail continueront à augmenter. Comme le montre la dernière enquête mobilité. Sauf à répartir autrement le travail, mais là, c’est un autre sujet…
Nous comptons sur votre engagement moral à motiver sincèrement et sérieusement cette demande de classement en zone tendue. Nous espérons que le gouvernement donnera à ALM les moyens de mettre en place concrètement et rapidement de premières mesures de régulation du marché locatif, en particulier la régulation des locations courtes durées et la modération des augmentations de loyers entre deux locataires.
Et nous vous invitons dès à présent à préparer les conditions pour un véritable encadrement des loyers sur notre territoire, à commencer par la création d’un observatoire local des loyers, étape indispensable au plafonnement des loyers. Les besoins tant sociaux qu’écologiques exigent une intervention forte de la collectivité sur le marché des logements, et il serait extrêmement dommageable de perdre encore 4 ans…
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