Intervention d'Yves Aurégan sur la consommation du territoire intelligent, Conseil municipal du 20 décembre 2021.
On ne peut qu’approuver le principe d'essayer de réduire l'empreinte environnementale du numérique. Cela n'a absolument rien d’immatériel et c’est même au contraire terriblement matériel.
Le numérique est très consommateur de ressources. Pour exemple, pour un ordinateur portable, il faut à peu près bouger 600 kilos de matières premières et cela émet environ 114 kilos de CO2 pour fabriquer l'ordinateur.
Ce qui est intéressant, c'est que cela représente à peu près 75 % du CO 2 qu'émettra cet ordinateur tout au long du cycle de vie. Le point qui est presque le plus important, la moitié de l'empreinte du numérique, c’est dans les fabrications.
Ceci veut dire que, globalement, il faudrait arriver à réduire le nombre d'ordinateurs et d'équipements numériques qui sont fabriqués. C'est un peu ce que dit l’Ademe dans son document récent Route vers la sobriété numérique.
Ce qui m'a un peu manqué dans la Charte, c'est de ne pas avoir le mot sobriété, parce que je pense que les solutions globales relèvent plutôt de la sobriété. Alors, il y a bien quelque chose de la sobriété.
C'est bien de dire qu’on veut du réemploi dans le patrimoine numérique mais, par exemple, on aurait pu se fixer un objectif. Intégrer du matériel d'occasion, c'est parfait, cela permet de rallonger la durée de vie du matériel, mais on aurait aussi pu se donner directement un objectif. L'allongement de la durée de vie des équipements numériques, on aurait pu aussi se donner des objectifs.
Il y a une mesure qui m'a un peu un peu étonné. C'est l'histoire de débrancher les dispositifs de recharge lorsqu'ils ne sont pas en usage. Il faut de toute façon éviter le gaspillage, mais quand on va voir la consommation d'un chargeur téléphonique non branché, inférieur au milliwatt, on n'arrive pas tellement à le mesurer, cela m’a fait penser que, dans notre ville, on va aussi brancher en permanence un certain nombre de capteurs qui sont des capteurs de présence, par exemple pour le Territoire intelligent, et que chaque capteur branché en permanence sera à peu près un watt de consommation, soit 1 000 chargeurs débranchés.
Cela amène à relativiser ces petits gestes qu'on demande aux utilisateurs et qui finalement sont un peu culpabilisateurs, alors que d'un autre côté on va, par nos décisions, augmenter la consommation.
C'est bien pour cela d'ailleurs qu’il est difficile pour la ville de parler de sobriété numérique. On est en train de faire l'exact inverse en construisant le Territoire intelligent et la Smart City. On va installer des dizaines de milliers de capteurs, autant de circuits électroniques, des données qu'il faudra faire transiter, stocker donc, sans compter tous les objets connectés, etc.
C'est juste l'inverse finalement d'une sobriété numérique. L'idée n'est pas de discuter le bien-fondé écologique de la Smart City, bien que cela pourrait être intéressant, de discuter de la trajectoire qu'on veut utiliser pour aller vers plus d'écologie par exemple.
Il serait intéressant de discuter des 4 scénarios proposés par l'Ademe sortis récemment dans transition en 2050. Il semble que le fait qu'on soit déjà sur une Smart City nous classe d'emblée vers les scénarios plutôt techno-optimistes, les scénarios 3 ou 4, alors que si on optait pour la sobriété, on opterait plutôt pour les scénarios 1 ou 2.
C'est un débat qui me semble important d'avoir à l'avenir et de savoir sur quels scénarios on veut s'enclencher pour obtenir donc une réduction des émissions des gaz à effet de serre.
Pour revenir sur le sujet plus précis de la délibération, ces sujets-là sont toujours un peu compliqués. La Charte va un peu dans le bon sens. C'est difficile pour nous de voter contre. On trouve franchement que cela ne va pas du tout assez loin et c'est aussi difficile de voter pour. Nous nous abstiendrons sur ce vote.
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